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Godechot Olivier, 2006, « La finance, avant-garde du prolétariat ? Les salariés de la finance et la structure de classe », Carnets de bord, n°10, Genève, p. 55-66. Sans réhabiliter le lourd appareillage de la valeur travail, il peut être fécond, pour penser les classes, de s’inspirer des économistes classiques et d’accorder une plus grande attention à la répartition des revenus au travail, et en tout premier lieu des salaires, et aux droits de propriété, implicites ou explicites, mobilisables par les parties prenantes pour capturer les fruits de l’activité collective. L’industrie financière constitue de ce point de vue un laboratoire très intéressant, en raison de l’importance des rémunérations – comme montant et comme enjeu. Les salariés ont en effet imposé un rapport de force très favorable au travail à contre-courant des autres secteurs. Les salariés de la finance montrent-ils la voie aux autres en imposant que la « valeur créée » le soit moins pour les actionnaires que pour les salariés ? Ou, au contraire, parce que le modèle est difficilement imitable, se constituent-ils en classe à part, en compétition tant avec le capital qu’avec les autres salariés ? Toutefois, le salariat de la finance n’est pas un bloc homogène mais plutôt un ensemble de strates, qui occupent des positions inégales et antagonistes dans la distribution du profit. Pour qualifier celles-ci de classes à la manière des classiques, il faut alors voir l’organisation du travail comme une allocation de droits de propriété sur les actifs de l’entreprise. Ces droits de propriété implicites deviennent alors le support de l’appropriation du profit par les salariés les mieux dotés au détriment de ceux qui le sont moins : les salariés disposant des actifs les plus importants et les plus détachables, peuvent à la fois réclamer légitimement le profit comme le fruit de leurs actifs et l’obtenir en menaçant, véritable « hold-up », de redéployer leurs actifs en interne ou en externe. |
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